Samantha Bailly

La trilogie complète en poche !

Publié le : 25 février 2019

Nouveau cycle en poche

Voilà, ça y est, la trilogie complète composée des Stagiaires, À durée déterminée et Indéterminés est disponible en format poche, chez Le Livre de poche ! Une sortie qui aura son écho dès le printemps prochain, avec à son tour la sortie de Nos âmes jumelles, Nos âmes rebelles et Nos âmes plurielles chez Le Livre de poche jeunesse. Ainsi, ces deux trilogies générationnelles, l’une portant sur l’adolescence, l’autre sur les jeunes adultes, vont vivre encore une toute nouvelle vie.

Déterminé et indéterminé

Il y a sept ans, j’étais stagiaire. Époque où tous les possibles s’étendent à l’infini sous ses pieds, où aucune direction n’est scellée. Tant de chemins potentiels peut galvaniser comme paralyser. À cette période de carrefour se pose la question de qui l’on veut devenir, dans une société ou être, faire et avoir se confondent si souvent dans les esprits.

 

Le travail, qu’il soit passionné, alimentaire, épanouissant, minant, mesuré, démesuré, est ce temps de vie que l’on donne, pour recevoir en retour. J’avais déjà publié de nombreux ouvrages, et je me suis lancée à plein temps dans l’écriture, sans autre filet de sécurité que ma détermination et l’effort d’allier pragmatisme et imagination. N’ayons pas peur de ce qui n’est pas supposé se mélanger. Des ailes dans le dos, mais les pieds sur terre. Essayer, quitte à se tromper. Car rien à perdre. J’ai fait le choix de la fiction pour dire le réel. Un choix qui n’en est pas un : créer, c’est une façon d’être au monde, de percevoir son environnement, d’y vivre ou d’y survire.

Observer, transformer, embellir, noircir, taire, dire.

Les histoires, à travers les livres, les films, les séries, les jeux vidéo, le théâtre, la radio, Internet aussi, nous façonnent, nous changent, nous questionnent, nous nourrissent, nous consolent, nous guérissent. Depuis 2014, je tente de déchiffrer à travers mes romans les mécanismes qui vont de pair avec ceux que l’on nomme les Millenials, ou digital native, ou générations Y et Z. Une génération qui a une particularité : avoir grandi ou grandir dans une mutation rapide des habitudes liées au numérique et au virtuel. Ces écrans qui viennent questionner notre rapport aux autres, au travail, aux émotions.

 

Un paradoxe : raconter l’entreprise quand soi-même, on n’y est plus depuis longtemps. Mais faire d’auteur mon métier, métier qui a certains parallèles avec bien des professions indépendantes, m’a appris une première chose. Dans le monde du travail, même en étant électron libre, nous ne sommes jamais réellement « en marge » des entreprises, ou des autres. En périphérie, en tant que satellites, nous en ressentons les contraintes, les effets positifs comme négatifs. Liberté fantasmée à relativiser, donc.

La fin d'un cycle

J’achève aujourd’hui une trilogie. Les histoires croisées d’Ophélie, Alix, Arthur, Enissa, Vincent, Hugues, Samuel, Mika, et bien d’autres. Les Stagiaires, À durée déterminée, Indéterminés. L’idée est la suivante : un roman, une forme de contrat. Stage, CDD, CDI. Des jalons, pour ceux qui suivent cette route bien linéaire du CV comme il faut. Ces jeunes employés travaillent dans une entreprise de l’industrie créative, Pyxis, qui incarne le rêve de nombreux passionnés par la culture des médias. J’ai suivi ces personnages de leur 20 à leurs 30 ans, de leurs premiers pas en tant que stagiaires, puis à travers toutes leurs métamorphoses. Des rencontres, des réussites, des échecs, des arrivées, des départs, mais surtout des individus, vivants bien que de papier, qui cherchent leur place dans le monde, évoluent, s’accrochent, s’écorchent, basculent, tissent des liens et les rompent. Tous viennent d’horizons sociaux variés, tentent de faire cohabiter les idéaux qui ont irrigué leurs vies depuis l’enfance avec la dureté d’un modèle économique qui semble dépasser et engloutir leur humanité. Une tentative d’apporter un éclairage actuel sur les secteurs du divertissement et les fantasmes qu’ils incarnent. Accompagner ces personnages dans ce qu’on aime appeler une aventure. Car de plus en plus, l’entreprise reprend finalement les codes de la narration, afin de présenter une histoire.

Stage. CDD. CDI.

Le continuum espéré, les chapitres que l’on cherche pour scander son récit professionnel. Une suite de contrats de travail d’une logique implacable. Les stages qui s’enchaînent, s’achevant sur des notes tantôt joyeuses, tantôt amères. La marche suivante : le CDD. Ouverture aux indemnités entre deux contrats, les responsabilités… mais toujours pour une durée bien délimitée dans le temps. Et puis, le graal, le CDI. Contrat à durée indéterminée. Indéterminé. Choix de mot intéressant. Un flou qui pourrait paraître angoissant, et pourtant, cette incertitude est gage d’une forme de stabilité. Aucune date de péremption annoncée. Différents types de contrats, comme le reflet d’étapes de vie : de la précarité, du doute, des errances, jusqu’à une forme de stabilité.

 

Bien sûr, voilà qui est bien moins excitant que l’entreprenariat, les levées de fond, les incubateurs. La grande aventure de notre génération : la start-up. C’est un nouvel Eldorado, promesse d’une aventure extraordinaire, de réussite, d’autonomie, de ticket gagnant au Loto de la vie professionnelle. Plus de risque, potentiellement plus de gain. Mais qui, aujourd’hui peut tout plaquer, se lancer dans une aventure ? Ceux qui ont tout de même le luxe de prendre le risque. Car lorsque l’on est dans la survie, l’enjeu principal est de s’assurer un toit et un minimum de revenu. C’est paradoxalement bien souvent dans la sécurité que l’on peut « sortir de sa zone de confort ». Sinon, l’énergie est dirigée vers ses besoins primaires. Aussi, le CDI est encore vécu aujourd’hui comme une véritable victoire, l’issue d’un parcours du combattant.

Pas une, mais des générations

À travers cette exploration, ces recherches, ces récits de vie, je ne retrouve pas la peinture que l’on fait habituellement de notre génération dans les médias. Une génération qui serait narcissique, paresseuse, impatiente, qui pense avoir tous les droits. C’est gommer de toute façon les écarts sociaux bien réels, un manque d’équité. Je vois et j’observe des générations plurielles et battantes, en prise avec un monde incertain. J’écris sur ces changements, ces fractures, et la collision des idéaux avec la réalité. La notion même de travail se métamorphose, nous met face à des questionnements profonds. Ce qui est déterminé et indéterminé – délimité dans le temps, déterminisme social, salariat et indépendance, stabilité et instabilité. Les changements font partie de toute société, la question est toujours : comment ces derniers se déroulent-ils ? Dans la violence, ou dans l’humanité ? Mettre en scène l’entreprise dans la fiction, c’est explorer l’intimité, les émotions, notre façon de vivre le travail. Ne pas être que dans le faire, dans l’avoir, mais dans l’être. On invite sans cesse à dissocier vie professionnelle et vie personnelle. Nous pouvons encore et toujours scinder, mais dans la réalité comme dans la fiction, il y a simplement la vie tout court.
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